Biographie de Peter Tosh
Né à Church Lincoln (Westmoreland) en Jamaïque le 9 octobre
1944, Winston Hubert Macintoch dit Peter Tosh n'a
pas connu son père. Sa mère (Alvera Coke) pauvre adolescente ne
pouvant l'élever le confie à une tante dans la ville côtière
de Savana La Mar. Personne dans sa famille n'avait les moyens de lui assurer
une éducation décente mais il était très déterminé
et talentueux.
Jeune adolescent, Peter s'installe à Denhamtown l'un des quartiers chauds
de Kingston. Il partage son temps entre la rue, l'école et la chapelle
du quartier. Dans la rue, il vit de petits "business". Comme tous
les ghetto boys, il côtoie les jeunes kids de Trenchtown. Tosh n'a pas
beaucoup souffert du "milieu" car son arrogance et sa grande taille
le mettaient à l'abri des surprises désagréables. Il était
respecté par ses pairs. Bien sûr il eut quelques démêlés
avec la police pour détention de ganja, violence et surtout pour ses
idées politico-philosophiques. La crise économique des années
60 rend la vie insupportable aux jeunes du ghetto. La drogue et la misère
participent à l'explosion de la criminalité et les brutalités
policières n'arrangeaient pas du tout les choses. La tension était
permanente dans les quartiers pauvres de Kingston. Le déclin de l'agriculture
jamaïcaine amplifie l'exode rural et l'explosion démographique dans
les ghettos.Tout naturellement Peter cherchait une issue à sa situation.
Il dit avoir vécu et vu des choses horribles à Trenchtowm.
Il fréquentait épisodiquement la paroisse mais pas pour le catéchisme
ni pour écouter les "bonnes paroles" du pasteur (pourtant il
était très croyant) mais pour avoir accès à la guitare
que le pasteur lui confiait de temps en temps. Très vite, ses dons pour
cet instrument furent remarqués. Il était aussi un bon pianiste
très tôt. Ce surdoué se mit aussi à la chanson en
intégrant la chorale. Mais Peter s'ennuie très rapidement car
les répétitions de chants spirituels laissaient peu de place à
des improvisations et à l'éclosion d'un talent personnel. Et surtout
ses idées révolutionnaires dérangeaient les gardiens de
l'ordre moral et politique. L'église officielle et la police ne voyaient
pas d'un bon oeil l'avènement de ce mouvement qu'est le rastafarisme.
Peter Tosh n'avait-il pas demandé publiquement la légalisation
de la marijuana ? Peter chantait dans la rue contre quelques shillings. Il dénonçait
la manipulation mentale de l'église qui encourageait la diabolisation
et la marginalisation des rastamen du ghetto.
Tosh fut influencé par le Blues , la Soul et surtout le Ska. Le Ska
véhiculait des messages de rebellion, d'encouragement et de prise de
conscience. C'était aussi la période des indépendances
dans le tiers-monde, l'époque du black power. Le Ska rencontra un grand
succès auprès des jeunes du ghetto. Peter Tosh essaya des mélanges
de genres musicaux assez surprenants. Il perfectionna sa guitare et sa voix.
C'est aussi à cette époque que le Ska fut détrôné
par le Rock Steady (plus rythmique) qui deviendra plus tard le Reggae.
A la même époque, un certain Robert Nesta
Marley cherchait aussi sa voie. Bob avait rencontré Joe Higgs
un artiste qui avait une autorité morale sur les jeunes du ghetto. Higgs
était un modèle pour Bob Marley. Rappelons que Bob aussi était
privé de père et trouvait en Higgs un maître sur le plan
musical et le père qu'il n'avait pas connu. Bob et son copain Bunny Livingstone
(Bunny Wailer) ont rencontré Peter Tosh lors d'une séance organisée
par Higgs. Peter Tosh très bon guitariste et chanteur talentueux se joint
à Bob et Bunny pour former un trio qui aura pour nom "The Wailing
rudeboys", puis "The Wailing Wailers"
et enfin "The Wailers". Ainsi naquit le plus célèbre
des groupes reggae.
Sous la direction de Joe Higgs , de Coxsone Dodd, de Lee Scratch Perry et enfin
de Chris Blakwell (de chez Island) le groupe enregistre plusieurs albums. Certains
albums étaient pressés à quelques dizaines d'exemplaires
seulement, juste de quoi rembourser les frais de location de studio et s'acheter
une paire de chaussures ou un costume neuf. Le chaos économique et social
qui régnait en Jamaïque à cette époque favorisait
les piratages de disques d'autant plus que les radios officielles programmaient
très peu de reggae. Cette musique de par le message qu'il véhicule
était jugée subversive. Les premiers disques des Wailers étaient
bien accueillis par le public lassé d'écouter la pop anglo-américaine
dont on l'abreuvait. Les Wailers ont trouvé leur voie. Ils rencontrent
le succès mais étaient fauchés.
Bob part aux USA voir sa mère. Il y resta quelques mois en vivant de
petits emplois, Bunny fait un court séjour dans les geôles pour
détention d'arme et usage de marijuana. Peter ne tardera pas à
goûter aussi aux délices de la prison.
Il y fut même tabassé et en garda un très mauvais souvenir,
ce qui n'a fait que renforcer la haine qu'il avait envers la police.
Bob à son retour des Etats Unis , apporte une touche pop-rock aux oeuvres
des Waillers. Le groupe grandit et s'ouvre à d'autres influences musicales.
Bob devient le leader incontesté des Wailers, mais la frustration et
surtout le désir d'être libre par rapport aux maisons de production
poussent Peter et Bunny à partir. Nous sommes donc en 1974, le trio historique
des Wailers se sépare. Peter Tosh démarre alors une carrière
solo avec un début difficile. La rumeur fait état d'un conflit
entre Bob et Peter, il n'en était rien. Ils sont restés amis.
Ils ont même fait des concerts ensemble et ont joué parfois avec
les mêmes musiciens (les frères Barrett par exemple). Bunny Wailer,
Judy Mowatt et surtout Rita Marley ont collaboré à la réalisation
du premier album solo de Tosh. Pour l'anedocte, signalons que Peter a épousé
la soeur de Bunny. Une grande famille en somme... Mais on ne comprend toujours
pas pourquoi Peter n'a pas assisté aux obsèques de Bob Marley.
Peter rastaman pratiquant, arrogant et coléreux avait une mauvaise réputation.
L'étiquette de bad boy des Wailers lui collait à la peau et il
entretenait bien cette image. Il dénonçait la corruption, le mensonge
et toutes les inégalités. La véhémence de ses propos,
ses rapports avec la presse et son tempérament en font l'image contraire
de Bob Marley. Peter était très mystique et révolté
à travers ses chansons. Son engagement dans la lutte anti-apartheid en
Afrique du sud et ses prises de position en faveur des opprimés de tous
les pays lui attiraient quelques ennuis avec la police politique de l'île.
Grand militant des droits de l'homme (les vrais droits de l'homme
), il
réclamait la justice avant tout. Profitant du méga concert de
la paix et de la réconciliation (Kingston Avril 1978), il réitère
son message qu'il avait lancé dans l'album "Equal
Rights" : " La paix est un diplôme qu'on vous délivre
à titre posthume au cimetière. Tout le monde réclame la
paix mais personne ne demande la justice. Je ne veux pas de cette paix, car
nous avons tous besoin des mêmes droits et de justice avant tout".
Peter était un grand ennemi de Babylone
(le système encore actuel) qu'il vilipendait à travers ses chansons.
C'était un chanteur très engagé et très pessimiste
sur l'avenir de l'humanité, il était apocalyptique. Ses messages
rejoignent ceux du musicien nigérian Fela Anikulapo Kuti.
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Grâce à ses talents vocaux il rencontre les Rolling Stone qui l'emmènent dans une tournée à travers les USA et l'Europe. De cette collaboration naîtront deux disques (Bush Doctor et Mystic Man). Tosh devient alors une machine à produire des hits et enchaîne les concerts en Jamaïque et ailleurs dans le monde. Plus tard, Peter s'entoure du plus célèbre duo rythmique de la planète reggae à savoir Robbie Shakespeare à la guitare et Sly Dunbar à la batterie. Il forme le groupe "Word Sound & Power" qui l'a accompagné partout. Il réussi à s'offrir les services de l'excellent saxo (ténor et alto) Dean Fraser, la référence saxo du reggae. Dans la classification des différents styles de reggae, Peter Tosh fait partie des "Roots" de par son style musical et les messages de ses textes. Nous rangerons également dans ce groupe Bob Marley, The Gladiators, Capital Letters, Burning Spear, I Jah Man, Cimarons, Max Romeo, Heptones, Culture, Dennis Brown, Jacob Miller, Lee Scratch Perry, U Roy, I Roy, Bunny Wailer, Kiddus I, The Upsetters, Kingston Feeling, Twinkle Brothers, Mighty Diamonds, Pablo Moses, Culture, etc... la liste est très longue. Les années 80 coïncident avec l'explosion du reggae en différents styles. Un pôle européen est né en Angleterre avec l'avènement du reggae issu de la deuxième génération d'immigrés jamaïcains. Dans cette catégorie, je rangerai bien volontiers Steel Pulse, Aswad, LKJ, etc
Tosh est devenu une grande pointure dans la galaxie reggae. Mais
avec le temps ses productions discographiques devenaient de plus en plus rares.
Le public a attendu quatre ans la sortie de son dernier disque. Il s'est éloigné
un peu de la scène et voulait entamer une carrière de producteur.
Il se proposait d'aider les jeunes artistes de son pays. Il n'a jamais renié
son style, il n'acceptait pas les compromis. Il a toujours défendu ses
convictions. Il n'est jamais tombé dans la facilité et n'a jamais
fait du reggae commercial soft, ce qui est un exploit quand on connaît
la pression du lobby des maisons de disques.
Le 11 Septembre 1987 au soir, trois pseudo-cambrioleurs armés font irruption
chez lui et l'assassinent. Sa femme et ses invités qui étaient
présents furent blessés. Parmi les meurtriers se trouvait une
ancienne connaissance de Peter Tosh. Les circonstances
de sa mort restent floues. On parle d'un marché que Peter n'aurait
pas respecté, d'un règlement de compte, de la police politique,
des services spéciaux d'un pays (CIquelque chose, peut etre). Signalons
aussi que Peter Tosh et un ami étaient sur le point de prendre le contrôle
d'une station radio très populaire en Jamaïque et voulaient transformer
cette radio généraliste (la seule independante en Jamaïque)
en une radio 100% reggae. Les discussions étaient tendues. Cette radio
était considérée comme un instrument potentiel de propagande,
un outil stratégique, voire une arme. Peter avait beaucoup d'ennemis.
Ce qui est certain c'est qu'il a été victime d'un complot ou d'un
contrat. Peter Tosh gênait beaucoup de gens. L'un de ses meurtriers est
aujourd'hui en prison après un procès expéditif et une
délibération record de 11mn. Les deux autres assassins courent
toujours. Le mystère qui entoure sa mort contribue à entretenir
le mythe et la légende du personnage.
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